dimanche 16 décembre 2018

Sens . Compagnie ARCOSM

Un homme âgé se balance doucement sur un rocking chair. Le grincement régulier s'amplifie légèrement et rythme ce qui pourrait être un rêve éveillé, un flash back ou peut être des réminiscences peuplées de rencontres improbables. Ce court spectacle ne donne surtout pas de sens unique au spectateur. Il lui laisse le bonheur de se faire lui-même son cinéma. Il suffit de se laisser porter par la sensualité qui émane de cet ovni poétique à la mélancolie pétillante et colorée.   Entre jeudi et samedi, plus de 1100 spectateurs ont fait  cette expérience sur les quatre séances proposées par le théâtre.



" Si le monde n'a aucun sens, qui nous empêche d'en inventer un ? " se demandait Alice depuis son pays des Merveilles. Ici pas de lapin blanc pressé, mais des personnages à la tête de valise ou de chrysanthèmes se font absorber par une affiche de cinéma. "Sens" ne choisit pas entre cinéma, danse et musique. Il les convoque tous.  Ils dialoguent en toute liberté et se nourrissent mutuellement, dans l'instant. Il suggère des porosités entre les personnages qui pivotent sur eux-mêmes, se touchent,échangent leurs rôles, se font tourner dans tous les sens jusqu'à le perdre.  Pour mieux en trouver un nouveau? Il croise les temps avec souplesse, utilise les décors avec ingéniosité. Un bruit se transforme en musique qui se prolonge en geste qui s'épanouit en danse avec une telle fluidité qu'on en oublie la rigueur des mécanismes qui charpentent ce spectacle en-chanteur.

 Il fallait entendre les éclats de rire des enfants dans la salle, sensibles au burlesque et à l'absurde qui veine ce petit bijou . Enfin, entre ritournelles entêtantes et bruitages, boucles répétitives et bricolages foutraques à l'ancienne, la musique infuse ce spectacle attachant à l'esthétique qui oscille entre surréalistes belges et ... arts forains.















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samedi 3 novembre 2018

harpes divines

A l 'opposé de l'esprit sombre de novembre, le Roudour a offert un concert lumineux à son public mercredi soir. La harpiste galloise Catrin Finch et le joueur de kora sénégalais Seckou Keita ont fait l'unanimité auprès des spectateurs qui les ont rappelés avec enthousiasme en fin de concert. Faisant fi des frontières, leur musique semblait portée par les courants ascendants pour mieux s'élever dans les airs et se jouer de la lumière par de subtiles variations de tons et de rythmes. Concentré, puis transporté, le public a suivi les deux artistes complices dans ce voyage en apesanteur. Qu'ils parlent du voyage des esclaves depuis Gorée au Sénégal ou célèbrent le retour du balbuzard migrateur longtemps chassé du pays de Galles, c'est avec grâce et délicatesse qu'ils entrelacent les cordes de la harpe et de la kora et les font dialoguer.


Le rayonnant Seckou Keita avait déjà impressionné lors de sa prestation avec Omar Sosa et l'OSB. Il a trouvé une partenaire à sa hauteur en la personne de Catrin Finch harpiste d'exception. La synergie est remarquable, l'émulation féconde, l'harmonie enchante. Ensemble, les deux artistes portent au plus haut cette musique ample et libre, au croisement de leurs deux cultures. Les 220 spectateurs ont goûté avec ravissement la beauté d'un art qui s'adresse à l'âme, touche les sens et élève l' esprit.









mardi 9 octobre 2018

Le petit bal perdure









On l'avait connu en p'tit Gus, le saxophoniste et conteur Jean Louis le Vallégant est revenu en Bigoud, Dany de son prenom, et a déroulé toute la vie de ce balucheur secoué par un AVC. Ce spectacle intimiste, évocateur et délicatement mis en espace et en son a touché les soixante dix spectateurs présents samedi au Roudour.

 Dany ne se prétend pas artiste mais plutôt artisan de la clef de sol , sans bémol, mais avec amour toujours, comme dans la chanson.  Sous la veste à paillettes il a le marcel qui chauffe et chaque samedi sous la boule à facettes sa Josiane devient Cindy , chanteuse et amoureuse, jusqu'aux douze coups de minuit.

Empêtré dans son "manque de mots" restés coincés à cause de cette saleté d AVC, Dany ne renonce pas. Il se souvient obstinément du petit bal perdu que les moins de vingt ans ne peuvent pas connaitre... Car il  n a pas dit son dernier mot, Dany et chaque souvenir les fait renaitre, un a un. Le sourire aux lèvres, tantôt parce que c est drôle, tantôt parceque c est émouvant ou les deux à la fois, le spectateur a envie de lui souffler" Allez Dany, vas y chauffe encore pour un dernier tour de piste à danser, toi qui a mis tant d étoiles dans nos samedi soirs. Valse ou tango , you'll be good..."